La petite violette
Extraits de "Choix de lectures pour l'année", par C. Hanriot, Delagrave, 1873
Imité de l'allemand
Par une belle matinée de printemps, une petite violette venait d'éclore sur la rive d'un frais ruisseau[...]."Quoi! dit-elle, vais -je éternellement rester là, à voir couler cette eau du matin jusqu'au soir? [...] Echappons-nous de ce gîte obscur!". Sitôt dit, sitôt fait : elle part, elle va vers la montagne [...]: le désir lui donne des ailes; elle arrive sur le premier plateau où brille un beau soleil, et elle regarde: je ne vois encore presque rien, dit-elle, une fois installée; montons un peu plus haut[...]c'est de là que je verrai le monde à mes pieds." Et elle se remet en route; elle avance plus difficilement; la terre devient plus rude et le soleil moins chaud. [...] Elle parvient à son but : "Ah! la vue est plus belle ici[...];mais pourtant, si je montais encore[...], je verrai le ciel, et je contemplerai les planètes. Allons, un peu de courage! Avançons!"
Et la petite violette ambitieuse s'efforce de gravir l'âpre rocher. A grand'peine elle s'élève plus haut, son regard se trouble; le vent froid siffle autour d'elle et glace ses petits membres; elle veut redescendre; il n'est plus temps. Là voilà toute engourdie qui s'affaisse; ses belles couleurs se ternissent,et, mourante, elle dit : " Qu'il faisait bon, hélas! au bord de mon ruisseau! qu'il était doux d'y vivre au milieu de mes soeurs!..." Et la pauvre petite violette expira de fatigue et de froid.
Pour vivre heureux, vivons caché.